samedi 28 août 2010

Sondage-rideau sur les cathos

Sondage-rideau sur les cathos: "

54% des catholiques estiment que l’Eglise n’est pas dans son rôle lorsqu’elle s’oppose aux expulsions de Roms. Allez, donnez-moi plutôt le nombre de sondés qui pensent l’inverse et je vous dirai qui est catholique !



Le sondage fantaisiste du moment est tombé, il est là. Non seulement les catholiques pensent que l’Eglise n’est pas dans son rôle mais ils sont majoritairement favorables à l’expulsion des Roms. Voilà. Le désaveu. Le rideau tombe sur une semaine d’enthousiasme.



Il tombe sur une semaine d’une idée folle, celle que les catholiques reprennent un peu de voix dans la Cité. Et c’est La Croix qui l’a tiré.



Un sondage… Il a fallu sacrifier à cette folie politico-médiatique. On peut certes parfois souhaiter recueillir l’avis de la population mais encore faut-il que l’objectif soit, sinon atteint, du moins approché. Car on sait quoi penser des sondages : les derniers sondages sur la politique de sécurité de Nicolas Sarkozy, plébiscitaire chez Le Figaro, dévastateur chez Marianne, ont rappelé avec quelle précaution il faut les accueillir. Sur le sujet de la reconduite des Roms à la frontière, deux sondages publiés aujourd’hui fournissent des résultats présentant près de 20 points d’écart pour la même opinion (ou presque). Mais celui-ci est spécialement douteux, en plus d’être inopportun.



Une phrase, une seule, doit retenir votre attention, dans le flot de reprises de la dépêche de Reuters :



« la taille de l’échantillon « catholique » n’est pas précisée«


Il faut espérer que CSA fera une ristourne à La Croix, parce qu’un sondage pareil, faut pas le payer cher. Voilà un sondage qui ambitionne de refléter l’opinion des catholiques, mais qui ne dit pas combien il en a interrogé. Le scepticisme habituel quant à la représentativité des 1.000 français interrogés n’est rien à côté de la perplexité devant l’intérêt de ce sondage. On pourrait s’arrêter là. Refermer la page. D’ailleurs, Guillaume Goubert l’écrit lui-même : « l’effectif des catholiques pratiquants est évidemment faible au sein de l’échantillon ». Tu l’as dit… Guillaume !



45 catholiques « messalisants » dans ce panel à la noix
Arithmétiquement, ils étaient nécessairement plus de 2. Sinon, ça ferait pas 54%. Ils étaient peut-être 100, parce qu’avec 100 on tombe juste. Ca fait moins que dans mon église à la messe de 11h00, ce dimanche de mois d’août. Si l’on reprend les dernières enquêtes sur le nombre de catholiques, dans le meilleur des cas, il y avait 45 catholiques « messalisants » dans ce panel à la noix. Et malgré cela, on titrera que 54% des catholiques pensent que l’Eglise n’est pas dans son rôle lorsqu’elle critique la politique du gouvernement sur la sécurité et notamment sur les Roms. Mieux encore, il apparaît que les catholiques sont plus nombreux à penser qu’elle n’est pas dans son rôle que l’ensemble des français (54 contre 53). La différence est négligeable, mais divertissante.



Ce sondage est à la fois douteux et inopportun. Inopportun, car personne, personne, n’apportera dans son interprétation les réserves de La Croix, dans son édito, ou ses pages intérieures. La seule information qui en sera retenue, c’est que les catholiques ne suivent pas leur hiérarchie. Que le pape, les évêques, parlent dans le vide.



Demande-t-on au peuple si une politique démagogique lui plaît ?
Inopportun encore car, outre le fait que le débat sur les Roms est « piégé » – les catholiques sont assez favorables à l’application de la loi – demande-t-on au peuple si une politique démagogique lui plaît ? La réponse est connue, elle est dans sa définition. C’est une inversion du raisonnement : la politique a, précisément, été décidée sur la base des sondages. Ce sondage ne vient, en fin de compte, qu’étayer celui qu’aura commandé l’Elysée début juillet.



Mais admettons – au doigt mouillé faute d’indication fiable – que ce sondage reflète une réalité.



On ne sera pas étonné que des catholiques, dont on nous dit qu’ils votent majoritairement à droite, ait majoritairement peu goûté la critique. Pas forcément surpris qu’ils se déterminent davantage en fonction de leurs opinions politiques que de leurs convictions religieuses, surtout sur un sujet certes central, mais qui ne fait pas partie du dogme. Pas étonné qu’ils n’aiment pas se sentir secoués par les évêques dans leurs présupposés. Je n’ai pas à chercher bien loin pour trouver des catholiques qui, entre Nicolas Sarkozy et l’Eglise, se trompent de fidélité.



L’Eglise n’est pas une démocratie. Elle ne décide pas s’il est bon d’accueillir l’étranger après avoir sondé les fidèles. Que la parole des évêques veuille secouer jusqu’aux fidèles, voilà qui est parfait. Que les fidèles rechignent à se laisser secouer, voilà qui est banal.



Crédit photo : Looking Glass


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