jeudi 26 août 2010

Le PS dans un climat de pré-révolution sécuritaire

Le PS dans un climat de pré-révolution sécuritaire: "

Les universités

d'été du PS s'ouvrent vendredi à La

Rochelle en plein débat sur la sécurité. Sécurité qui sera, nous dit-on l'un

des thèmes principaux du discours de Martine Aubry dimanche (elle sera aussi

l’objet de deux

débats
à La Rochelle).


La sécurité et la gauche, c'est un vaste débat.

On a déjà décrit la façon dont ce thème avait souvent servi à la droite pour

souligner ce qu'elle prétendait être une forme d'irresponsabilité de la gauche.

Lionel Jospin en fût la plus éminente victime en 2002. Mais la gauche –comme

une grande– s'est longtemps suffit à elle-même pour se caricaturer. La sécurité

y a longtemps été un

thème de débat explosif
. Ce qui hantait les responsables socialistes,

c'était le poids respectif des deux frères ennemis: prévention et répression.

Dans le discours de la gauche au pouvoir au début des années 1980, l'accent

était mis sur la prévention après les années sécuritaires des ministres de

Valéry Giscard d'Estaing, Michel Poniatowski

et Alain

Peyrefitte
.


Donc, après 1981,

les maires emblématiques comme Gilbert

Bonnemaison
à Epinay-sur-Seine ou Hubert Dubedout à

Grenoble étaient mis en avant pour leurs actions audacieuses en faveur de la

prévention dans leurs villes. Ça n'a pas suffit, la violence n'a pas cessé

d'augmenter. Le Premier ministre, Pierre Mauroy a dû, dès 1983, injecter une

dose de «répression» dans son discours. Il créé une commission intitulée «prévention/répression/solidarité»

(le rapport remis par Gilbert Bonnemaison est consultable ici).

À l'époque, la gauche n'osait pas laisser «prévention» et «répression» face-à-face,

comme deux éléments égaux et complémentaires. Donc, on y a adjoint le mot

«solidarité», comme un adoucisseur pour s'excuser d'oser évoquer les rigueurs

de la répression. Comme la gauche parlait alors plus volontiers du «sentiment

d'insécurité» que de «l'insécurité» tout court, elle semblait sous-estimer son

importance. Pourtant, la gauche sécuritaire existe dans l'histoire politique: Jules Moch, ministre

socialiste en 1947 qui envoie pour la première fois des CRS contre des

grévistes ou plus près de nous, Jean-Pierre

Chevènement
et son ton de père fouettard de la République, incarnent

une tradition répressive de gauche.


«Dérive droitière»


«Rétablir l’ordre»,

dans l’inconscient collectif de gauche, c’est toujours un peu servir «l’ordre

établi», les puissants. Les répressifs de gauche tentent de s’en sortir en parlant

«d’ordre républicain», mais rien n'y fait, un homme de gauche qui réprime

devient, pour l'opinion, un homme de droite. C’est la jurisprudence Clemenceau.

Ségolène Royal a aussi subi ces accusations avec «l'ordre juste» et le ton

général de son discours en 2007.


Mais tout ça

change très rapidement. Les socialistes sont ultra majoritaires dans les

collectivités locales et toutes les préoccupations de ses élus se heurtent à

des problèmes de sécurité: éducation, développement économique des territoires,

transports. La réponse «c'est la faute à la société et au contexte» ne suffit

plus. Les maires de grandes villes de gauche ont une politique plus répressive

qu'ils ne veulent bien le dire, ils ne sont pas les derniers à demander, par

exemple le

démantèlement des camps illégaux de Roms
.


Il s'agit pour la

gauche, maintenant, de proposer une mission différente pour la police et de ne

pas être simplement sécuritaire, ce qu'elle reproche à la majorité. Là encore

les mots comptent. Bien des responsables de gauche ne réclament plus le retour

de la police de proximité (ça fait trop îlotier) mais une police

«territorialisée». Jean-Jacques Urvoas, le Monsieur Sécurité du PS, pose

d'ailleurs la question de l'éventuelle

décentralisation de la police
. Stratégiquement, le bon coup à jouer

pour le PS serait de réussir à faire de la sécurité un thème de gauche, comme

Nicolas Sarkozy avait réussi à chiper à la gauche le thème du travail en 2007.

Mais c'est déjà une révolution culturelle impressionnante que les socialistes

sont en train d'effectuer, comparable à la révolution spectaculaire que la

droite a vécu depuis 2007 sur les questions d'environnement.


Thomas Legrand


Photo: Martine Aubry le 3 juillet 2010. REUTERS/Benoit Tessier


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