Le fait est rare, et il n’est pas glorieux. Nicolas Sarkozy a eu le privilège rare de bénéficier d’une réaction du pape, à mots choisis.
« Les textes liturgiques de ce jour nous redisent que tous les hommes sont appelés au salut. C’est aussi une invitation à savoir accueillir les légitimes diversités humaines, à la suite de Jésus venu rassembler les hommes de toute nation et de toute langue (…)
Chers parents, puissiez-vous éduquer vos enfants à la fraternité universelle. »
Les mots du Pape n’ont été prononcés qu’en français, signe qu’une attention particulière à ce sujet est demandée aux français. Or, quand donc le pape s’est-il exprimé ainsi pour la dernière fois ? Quand donc a-t-il jugé utile de faire entendre sa voix sur la vie politique française ?
Et ce propos est loin d’être isolé.
Les fidèles eux-mêmes s’interrogent. On parle de malaise, on évoque un divorce. Approuvé par 61% des catholiques pratiquants en 2007, il ne le serait plus que par 47% d’entre eux aujourd’hui. Nicolas Sarkozy réalise donc un carton plein.
Cette fois, il s’agit des Roms, objets d’un amalgame douteux : Roms expulsés pour les faits de gitans, Gitans conspués pour la délinquance présumée des Roms. Gitans habitués à l’incompréhension, qui « disent leur souffrance ». Avions-nous un problème gitan avant cet été ? Ces gitans ? Un problème Rom ? La France est-elle effectivement submergée par les Roms, incapable de gérer leur présence ?
Cela fait en effet maintenant plus d’un an que le pays vit au rythme de l’instrumentalisation de l’étranger. Il y eut ce débat sur l’identité nationale, subitement suscité par le regain du Front National. Puis les mosquées. A peine le débat sur l’identité nationale à peine éteint, voilà la conductrice en niqab. Et déjà on voyait poindre le débat sur la déchéance de la nationalité. Les régionales. Une courte pause. Dans Le Monde du 21 août, Brice Hortefeux ose dire : « sur les questions de sécurité et d’immigration, le message des Français au printemps était limpide ». Dès lors, on poursuit : l’été engagé, voilà donc le discours de Grenoble, la déchéance de nationalité et la reconduite aux frontières des Roms. Et la rentrée s’ouvrira encore sur l’identité nationale et le projet de loi sur l’immigration. Chaque fois, le message est bien celui-là : nos problèmes viennent des étrangers. Ou des français d’origine étrangère.
C’est cette mécanique qu’il faut refuser. La ficelle est trop grosse, trop connue, trop facile. Le procédé n’est pas digne. On sait qu’historiquement, en période de crise, les peuples ont une tendance naturelle à incriminer les étrangers… sans qu’il ne soit nécessaire que les pouvoirs publics forcent le trait.
Surtout, l’Eglise rappelle ce qui devrait sonner si juste aux oreilles d’un homme de droite :
« il y a un principe de proportionalité dans les réactions qu’on peut avoir vis-à-vis des délinquants. On ne peut pas généraliser et prendre tout un groupe de personnes et les expulser. La responsabilité est personnelle, elle n’est pas collective »
C’est le secrétaire du Conseil pontifical pour les migrants et les gens du voyage, Agostino Marchetto, qui l’affirmait. Et Monseigneur Vingt-Trois ne disait pas autre chose. La droite devrait d’ailleurs regarder en face le visage qu’elle offre lorsqu’elle oublie ainsi l’un de ses premiers principes.
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Au risque de doucher de fugaces affections, impossible de clore ce billet sans un petit mot téméraire. Bienvenue à ceux qui trouvent soudainement l’Eglise sympathique. Mille bisous. Toutefois, à la prochaine poussée de catho-bashing, n’oubliez pas que c’est la même exigence, le même Amour et la même Parole qui guident l’Eglise dans sa défense la dignité de tout homme. Dignité de l’étranger… et de l’enfant à naître.
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Crédit photo : Melle Bé
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