Les dernières coiffes normandes : la bonnette de Bayeux: "Introduction
Je suis fier d'appartenir au peuple normand, celui des conquérants et des bâtisseurs de la cathédrale de Palerme... mais aussi à ces hommes, respectueux des traditions et défenseurs de leur patrimoine. J'ai eu la chance de naître dans une famille terrienne, établie au même endroit, depuis des siècles. J'ai grandi dans une atmosphère où l'on enseignait les valeurs d'une autre époque, et vécu toute ma petite enfance dans la vieille maison des Eudeline de Tourville, ma famille maternelle, où les acteurs de la vie de tous les jours étaient plus dignes d'un film sur le XIXe siècle, que des aventures de la Guerre des étoiles !
Oscillant entre ma grand-tante Bertine, coiffée d'un bonnet à la mode d'Anne de Beaujeu, et ma grand-tante Elmire, que je n'ai jamais vue dormir sans bonnet de nuit et marchant le jour avec deux manches à balai, j'ouvrais à ma guise toutes les armoires et les bonnetières endormies, ces gardiennes de trésors jalousement respectés par des mains pieuses, de génération en génération, depuis des siècles. Ces professeurs très particuliers, d'un autre temps, me donnaient les détails les plus croustillants de leur contenu.
À sept ans, je savais parfaitement comment mon arrière-grand-mère mettait sa bonnette, et du coup, je coiffais même mes amies d'école le jeudi après-midi, sous les instructions de ma grand-mère Marie-Louise.
À dix ans, je fabriquais des bonnettes avec les restes de dentelles, aidé de notre couturière Marthe, âgée alors de 90 ans, qui en avait confectionné au début de son apprentissage en 1902.
À douze ans enfin, après la disparition de cette famille du XIXe siècle, (moyenne d'âge de 90 ans), je me suis senti le devoir d'empêcher la destruction de tout ce patrimoine vestimentaire, qui était irrémédiablement voué aux flammes de la cheminée, sans ma ténacité à le sauver. Je peux aujourd'hui, grâce à cela, parler de tous ces costumes, pour avoir vécu avec des êtres, nés dans le dernier quart du XIXe siècle, qui les ont portés ou vus porter par leurs parents, en ce qui concerne les grandes coiffes, véritables emblèmes de la Basse-Normandie.
Ces merveilleux enseignants ont su me transmettre en totalité les témoignages de leur vie, dans les moindres détails : je suis donc «né en 1880», dans le Bocage."
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