Migrants internationaux et nouveaux réseaux criminels: "Des cohortes de migrants internationaux Afghans passent par les ports turcs et géorgiens de la Mer Noire : là ils se chargent de produits électroniques du Sud Est asiatique transitant par Dubaï et Koweït City. Totalement détaxés ils sont livrés en Bulgarie, c'est-à-dire dans la Communauté Européenne, à 40% de leur prix de vente européen. Environ six milliards de dollars de marchandises franchissent ainsi délictueusement nos frontières grâce à des migrants qui n ont rien à voir avec les Afghans misérables de la jungle de Calais. Les régulations des échanges bancaires liées à la Crise interdisent désormais à ces migrants, auxiliaires des stratégies commerciales du «poor to poor», «l entre pauvres» des grandes firmes, de bénéficier de lignes internationales de crédit -40% du montant des achats- que des banques émirates leur consentaient. Alors les réseaux criminels suppléent à cette «moralisation» des circulations de capitaux en offrant des sommes équivalentes d argent à blanchir et, en contrepartie, exigent des Afghans qu ils cultivent, pendant leurs migrations, le pavot à opium en Turquie et en Géorgie. En somme des dizaines de milliers d Afghans, accompagnés de Kurdes, d Irakiens et d Iraniens participent désormais aux activités des réseaux criminels et y associent de fait des grandes firmes de l électronique asiatique. Ces nouvelles accointances, étendues aux populations balkaniques, fournissent une main d uvre afghane et albanaise aux entreprises sud italiennes pratiquant le blanchiment du même argent sale. Ce phénomène est accompagné d une dynamisation des activités prostitutionnelles des réseaux criminels des Balkans, du Caucase et du pourtour méditerranéen vers les «clubs» du Levant espagnol, via Naples, Bari, Brindisi. De la Junquera à Malaga, la passe se négocie désormais avec une dose de cocaïne. La Junquera lieu d entrée privilégié associe aux revenus de ces activités les notables de part et d autre de la frontière et surtout de Perpignan. En fait nous assistons à une réorganisation des réseaux criminels sur le modèle de la «toile» internet, c'est-à-dire mondialisés, polyvalents, complémentaires. Un nouvel ordre criminel mondial se déploie sans contrôle, alors que les Etats peinent à définir leur place dans cette insaisissable mondialisation. Les chercheurs, anthropologues et sociologues, nous font vivre de l intérieur ces transformations au plus près des terrains qu ils explorent depuis des années.
Alain Tarrius, spécialiste des mobilités internationales, professeur de sociologie et d'anthropologie de la ville et des migrations à l'Université de Toulouse le Mirail, a réalisé ces recherches au CADISCNRS."
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